PARTIE I : RADIO BANDINI


En savoir plus sur Elvis, ne pas se soucier d’avoir le pied marin pour faire de vrais voyages, partir pour aller surtout au fond de soi… Radio Elvis nous livre quelques pistes, quelques invitations à le suivre.

Elvis. Un personnage haut en couleur à des années lumières de ce que tu fais. Que penses-tu du personnage ? De sa musique ?

À vrai dire, je suis beaucoup plus Cash que Elvis. Le personnage de Johnny Cash me parle beaucoup plus. Peut-être un peu moins bling-bling. Mais leur talent à tous les deux sont inestimables.

Nous avons pu lire que tu n’avais jamais pris le bateau. Tu voyagerais plus par le livre. Comment considères-tu le rapport entre littérature et musique, de manière générale et plus spécifiquement au travers de ton expérience ?

La plus part des groupes qui font ma mythologie musicale revendiquent une profonde inspiration littéraire. Des groupes comme Noir Désir, The Doors, Theo Hakola, Nick Cave ou Thiéfaine nous ont montré que l’on pouvait faire du rock en partant du texte. Ce qui implique par moment des bouleversements très importants dans la construction d’une chanson. Cette manière de faire m’a toujours intéressé.

Pour ma part, je ne crois pas faire de la musique pour la musique en elle même, mais bien pour l’expérience des mots. J’ai, aujourd’hui encore, du mal à me considérer comme un musicien. Il doit y avoir ce vieux fantasme d’être un jour un écrivain voyageur qui me taraude encore.

Le plus étrange est que j’ai découvert la littérature très tardivement. Du moins, je n’ai compris ce que je lisais qu’à l’âge de 20 ans. Je ne pense pas être un lecteur boulimique. Le besoin de lire se manifeste en même temps que le besoin d’écrire. J’ai de gros problèmes de concentration. La lecture est le seul moyen de m’apaiser. C’est de l’état dans lequel me plonge la lecture que naissent les associations d’idées et de mots.

Cela dit, le cinéma, la musique et la peinture me procurent les mêmes sensations. Le voyage est surtout immobile, ça j’en suis convaincu.

Dans « Demande à la Poussière », dont tu as tiré le titre du roman John Fante, l’influence de la littérature sur tes textes est claire. Peux-tu nous en dire un peu plus sur la musique en elle même ?

La mélodie principale est venue assez rapidement. Quasiment en même temps que le texte. J’étais en pleine lecture du livre éponyme. La tension de la musique n’était pas aussi présente que la version définitive. Je mettais l’accent sur la mélancolie de la mélodie. À force de la jouer, la tension est apparue d’elle-même notamment grâce à Colin. C’est devenu une chanson très physique, qui se chante avec le corps. J’ai l’impression que mon corps s’enroule autour de ma guitare et de mes mots lorsque nous la jouons.

Dans ce livre, Fante se met en scène en jeune écrivain qui doute de son talent et est tourmenté par son incapacité à écrire. Il est aussi obsédé par sa virilité, son incapacité à avouer son amour. (Les errances flamboyantes décrites dans le livre ont eu une influence déterminante sur l’écriture de Bukowski). Est-ce que tu te sens un peu « Bandini » dans ton personnage de Radio Elvis ?

Je ne pense pas avoir de personnage Radio Elvis. Cependant, il est vrai que je me suis identifié à Bandini. D’abord parce que les écrivains me fascinent et qu’avant de faire de la musique, il y a l’envie d’écrire. Je me souviens d’un concours de poésie auquel j’ai participé il y a quelques années. Quand je repense au moment où j’ai reçu la lettre m’informant que deux poèmes étaient sélectionnés pour l’édition d’un recueil, je me retrouve forcément en Bandini. L’envie d’encadrer la lettre, d’embrasser l’éditeur etc… La joie de se dire : «Ça y est, je vais m’en sortir ! Me voilà ! Je le savais, je vous l’avais bien dit !» En fait, tout est bien plus long que ça et beaucoup plus ancré dans la vie. Je pense que l’ego de Bandini lui joue des tours et ne fait qu’accroître sa naïveté, alors forcément, je m’y retrouve un peu.

Les thèmes du voyage, de l’exploration et de la conquête sont omniprésents dans tes textes. Dans tes textes, tu t’enfuis, tu parles de Traversée, et bien sûr de titre de l’EP Juste Avant La Ruée … d’où te viens cette obsession ? Tu dis y voir des thèmes, peux-tu les développer un peu ?

Ce qui m’intéresse au-delà du concept qu’apporte l’idée fixe du voyage, c’est d’écrire ce qu’est prêt à faire l’Homme pour atteindre les sommets qu’il se fixe. La foi, quelle qu’elle soit me fascine. La volonté de dépasser sa condition alors qu’au final, il n’y a rien, serait absurde s’il n’y avait pas la foi. Je veux dire en cela que les liens exceptionnels qui unissaient les pilotes de l’aéropostale par exemple, sont une forme de foi qui justifie les risques pris.

Personne n’est près à mourir pour du courrier. Mais si ce courrier à livrer me permet d’acquérir des valeurs et d’apprendre sur moi et l’humanité plus que n’importe quelle autre tâche, alors oui, le risque en vaut la peine. Les voyages et les conquêtes en particuliers m’intéressent beaucoup plus pour leur dimension introspective que pour les faits historiques. Je ne fais pas du docu-fiction.

Pour Juste Avant La Ruée, il n’est pas question de la ruée vers l’or, mais des courses à la terre organisées par les l’États-Unis à la fin du XIXème. Encore une fois, ce qui m’intéresse c’est ce que l’homme cherche à conquérir en dehors du territoire en lui-même.

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