Pilöt


N’importe qui ayant déjà mis les pieds dans une cour de récré vous le dira : à moins d’une dose massive de sédatifs, c’est l’apocalypse. N’importe qui ayant jeté une oreille sur les routes fiévreuses de Pilöt vous répondra : tant mieux.

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Ce groupe de gamins malades possède la faculté stupéfiante de réveiller en vous les soifs sauvages. De faire bouillonner ce qui, une seconde plus tôt, barbotait dans une tiédeur moite. Leur musique : à la fois une berceuse étrange et une transe hurlante. Une mêlée de joie, de rage, d’impulsions électriques et d’envie de chasser.

Armés d’une chanteuse hypnotisante et d’un bataillon de dérèglements sonores, ils ouvrent d’un coup de botte la brèche de vos envies manquées : pas de fugue à six ans, ni à douze, ni à quinze, et malgré la curiosité dévorante de vos cinq ans, la bouteille laissée sagement dans le placard. C’est cette première ivresse, manquée, qui remonte. Elle aurait pu être absolue, incompréhensible, mortelle, peut-être. Elle vous laisse avec ce creux, cette envie de savoir. Elle apparaît rageuse, vingt ans plus tard, soutenue par une transe futuriste, encouragée par le rythme des pieds martelant le sol.

Les musiciens vous kidnappent avec une classe fantomatique, ouvrent une nouvelle trappe vers ces régions sauvages. Ça palpite à nouveau ; c’est maintenant ou jamais. On s’y engouffre à cent ; on en ressort les oreilles arrachées, un bras cassé, l’impression d’avoir bu du sang, arraché un cœur palpitant, pour voir ce que ça faisait. Une lueur étrange dans les yeux, moitié peur, moitié fierté. C’était fou, c’était immanquable.

C’est promis, on ne sera plus jamais sage. Merci Pilöt. Et tant mieux, tant mieux.

par Camille Hardouin


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