OK


Aux environs de la quarantaine, il existe un intervalle de temps assez bref où le jeune crétin devient un type ok avant de se transformer en vieux con. Circulant le plus souvent à Paris dans une Opel Corsa, l’individu en question emmène sa femme et ses deux enfants à Megève tous les hivers et en Tunisie tous les étés. Il lit Jean d’Ormesson et Paris Match : la non-vie lui appartient.

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Le groupe dont nous vous parlons ce mois ci a beau s’appeler « OK », le choix du nom est un leurre, presque une bonne plaisanterie. Guillaume Magne et ses deux batteurs (oui deux !) – Seb Brun et Jeremie Piazza – n’ont certainement pas le profil des gens ok. Quand on rentre dans leur univers en appuyant sur « play », c’est comme si on poussait la porte d’un vieux laboratoire, un labo sans pipettes et sans fioles mais bourré de quatre pistes cassettes et d’instruments bizarres. Dans la quiétude de leur confinement, ces trois désosseurs de sons bricolent des rythmes qui viennent de nulle part, des petits bouts d’utopies qu’ils exhument, insèrent, agrègent, ressuscitent, on ne sait pas très bien.

Le dialogue des drums duettistes s’apparente en fait à celui que deux habitués d’un café relancent chaque jour à leur table désignée. Comme eux, les deux batteurs d’OK commentent, ils soupirent, ils murmurent, ils s’excitent, ils trépignent, ils fredonnent. De leurs conversations répétées naît un rythme souterrain, un bruissement structuré sur lequel se posent la guitare et la voix de Guillaume Magne avec douceur, comme s’il craignait de les déranger. Étrange tachycardie des profondeurs.

OK rêve. Dans un pré endormi, une vache insomniaque frissonne. Ses pattes enfouies dans l’herbe sentent palpiter en elles les entrailles de la terre. Elle écoute les odeurs et elle respire les bruits. Elle voudrait pouvoir jouer de la cornemuse.

par JDL


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