Paplib


Commençons par une question qui brûle les lèvres de nos lecteurs et de tes auditeurs : d’où te vient ce nom incongru qu’est Paplib ?

Ce n’est pas que je souhaite que ce soit secret… mais c’est très personnel.

Voilà qui tombe à l’eau ! Tu t’appelles comme ça depuis longtemps ?

Depuis la naissance du projet solo. Avant ça, je faisais parti d’un groupe rennais, Bellyache, dont certains membres continuent de jouer parfois avec moi, en live comme en album. C’est le cas de Xavier qui m’accompagne à la contrebasse sur les derniers concerts et joue deux titres sur l’album. Le groupe s’est dissout de lui-même après que chacun d’entre nous a suivi son parcours : l’un partait à Paris, l’autre à Tour…

Le projet solo date donc de ce moment ?

Grosso modo oui. C’était il y a maintenant trois ans.

Comment gères-tu le fait d’être seul ?

Suite à notre éloignement géographique, j’ai commencé à travailler seul dans mon coin pour faire avancer le groupe, sans vraiment m’imaginer que nous allions péricliter. A la fin du groupe, j’avais accumulé un certain nombre de compositions et d’enregistrements, et j’ai commencé à devenir autonome avec le temps. J’ai aussi assisté à des concerts qui m’ont marqué de ce point de vue-là, notamment SJ Esau du label Anticon, qui est lui aussi seul sur scène. Ce type se servait de boucles et pouvait déployer un univers relativement recherché tout seul ; c’était une révélation pour moi. Et d’ailleurs c’est plus intéressant de le voir en live que de l’écouter en CD. Bien sûr il y a d’autres exemples de types qui font de la musique seul (je pense à Panda Bear…), mais SJ Esau m’a vraiment marqué en live.

Tu n’as jamais pensé fonder un nouveau groupe à Paris ?

C’est très difficile de retrouver des gens avec qui je pourrais avoir des convergences musicales aussi fortes qu’avec les membres de Bellyache. Ils étaient avant tout des amis d’enfance. Pour moi c’est très difficile de faire avec des personnes que tu ne connais pas de la musique qui soit, non pas « pointue », mais en tout cas non-standard. Avec ces amis nous avions une conception de la musique proche, même si bien sûr il pouvait y avoir des tensions. Depuis je me suis résolu à travailler seul. Ca a l’avantage de me permettre d’avancer plus vite, parce que je n’ai pas à gérer ces différence de conception de la musique ou d’autres problèmes de communication.

Tu penses que ta conception de la musique t’empêche ou complique la possibilité de travailler en groupe ?

Oui, en quelque sorte. Il y a un coté logique à ça : quatre mecs qui font du rock sont déjà d’accords sur une base. Ils ne vont pas forcément se poser la question de l’enchaînement des refrains et des couplets, de la structure des morceaux, qui est déjà admise et présupposée par le style de musique qui les réunit. Je pense que c’est difficile de trouver d’une part des personnes qui ont envie de s’affranchir des standards musicaux de la même manière, et qui d’autre part ont des affinités similaires. On peut l’illustrer avec l’image des directions : si tout le monde est d’accord sur l’endroit où aller, un endroit bien connu, ça ne pose pas de problème, alors que si l’équipe décide de sortir des sentiers battus, il faut que tout le monde se mette d’accord sur le chemin à emprunter.

Comment conçois-tu la musique expérimentale ?

Déjà le terme est clairement galvaudé. Ce que je peux en dire c’est que je ne la conçois pas par opposition à la musique pop. Les Beattles ou Radiohead, c’est le sommet de tout, ce sont des groupes pop qui arrivent à l’expérimentation en passant par la pop.

Tu as dû apprendre à maîtriser de nouveaux instruments pour travailler seul ?

Oui, surtout les pédales loop pour faire des boucles. J’ai dû aussi apprendre à gérer ça sur scène. Bizarrement j’étais très stressé sur scène avec le groupe. Seul, je ne peux en vouloir qu’à moi-même finalement, alors qu’en groupe il y a la peur de louper un accord… et tu sens que l’autre, le guitariste ou le bassiste, va te jeter un petit regard désapprobateur. Avec le groupe, j’étais vraiment statique et concentré sur scène. Maintenant, j’ai moins peur du faux pas. Pourtant, les autres sont encore présents en un sens. Xavier me dit parfois très clairement ce qu’il pense de mes compos.

Qu’est ce que t’a apporté ce groupe ?

Le batteur m’a vraiment ouvert au free jazz, à la musique minimaliste et à l’absurde aussi. On avait une maison dans la campagne rennaise pour répéter, où on se réunissait parfois aussi pour jammer avec d’autres potes. Le batteur était justement le premier à lâcher son instrument pour un autre ! J’utilise encore certaines de ses compositions et notamment des textes.

Donc définitivement pas de projet de groupe ?

On n’est pas à l’abri d’une belle rencontre ! Mais au-delà de ça je n’en ressens pas le besoin. Parfois je collabore avec d’autres artistes, notamment Ugh !, aussi connu sous le nom de Tepid Yolk. On est de très bons amis, mais ce n’est pas toujours simple. Lui non plus n’a pas de groupe d’ailleurs, c’est un autre artiste solo.

Est-ce que tu pourrais nous parler de la scène rennaise et de ton lien avec elle ?

Rennais d’origine, je me sens forcément connecté en quelque sorte à cette scène. Autrement, à part les amis, je ne connais pas (ou plus) si bien. On avait crée une association avec des amis pour essayer d’apporter notre touche à la scène locale. On avait notamment fait jouer SJ Esau. Et je dois dire que la vie musicale est vivante, il se passe énormément de chose. Mais cette association, on l’a aussi créée parce qu’on trouvait qu’il y avait un manque dans un certain style musical à Rennes.

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