NIGHT RIDERS – Partie I


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Interview de notre obsession, Night Riders, partie I. Où on en apprend plus sur les groupes et labels français émergents, de Nantes et de Paris. Où on se dit qu’il faudrait se refaire quelques films érotiques français des 70’s, ou revoir Rasta Rocket, selon l’humeur. Où on reprend à zéro notre réflexion sur le caractère cyclique des courants musicaux. Rendez-vous très bientôt pour la suite de cette chevauchée : Part II – Welcome To The Machine.  ffffffffffffffffffffffffffffff

Quel est l’origine du nom du groupe ?

Je ne me souviens plus exactement, mais c’est une grosse référence à la pop culture des années 80.

Night Riders a un pied à Paris, un à Nantes. Mais en pratique, c’est Nantes ou Paris qui bat la mesure ?

Paris, tout simplement parce que nous sommes trois membres sur quatre ici, et que Charlotte (la Nantaise) y a vécu longtemps. Tout a commencé à Paris avant le départ de Charlotte, et nous continuons a y passer du bon temps quand nous sommes réunis à l’occasion des répétitions, des concerts et autres dîners mondains.

Êtes-vous influencés par la scène Nantaise, travaillez-vous avec certains groupes Nantais ? Pouvez-recommander quelques groupes Nantais à nos lecteurs ?

Pas du tout, nous connaissons un peu la clique de Futur (maison de disque de Minitel Rose, DAN, Rhum For Pauline entre autre), Quentin, le DA (qui est devenu Parisien depuis), Raphael (Pegase), et Fragil, le label qui nous a fait jouer au Lieu Unique… mais ça se limite à ça. Il y ’a bien Papier Tigre dans un certain registre que j’aime et que je recommanderais, mais je ne connais pas assez les groupes, mouvements Nantais, d’ailleurs je ne sais pas si on peut parler de scène.

Et pour Paris ?

Paris… Nous avons beaucoup d’amis qui font de la musique, mais de la même façon je ne sais pas si je parlerais de scène, dans le sens ou ça va de la Pop au Drone en passant par les grosses pointures de la musique Malienne. C’est sûrement lié à l’époque, mais j’ai l’impression que les gens que nous connaissons et côtoyons ne se limitent plus vraiment à un style.

En vrac, et pour les artistes les plus « pop » : Bois Noirs, Maestro, Gyrls, Calypso, Poni Hoax, Total Warr, Blackmail, Glass Figure, Château Marmont, j’en oublie sûrement, nous sommes tellement.

Pour les labels je citerais, Yuk Fu, Seven Sons, DeBonton, Ekleroshok, Third Side / Entreprise. Qui sont une vraie forme d’alternative à l’industrie et donnent leur chance à pas mal de groupes obscurs très intéressants.

Night Riders est un groupe électronique et live. Êtes vous un groupe qui va polir ses chansons, en corriger méticuleusement les imperfections pour avoir le rendu le plus soigné possible sur scène, ou alors vous en profitez pour y mettre de la rugosité, y risquer l’imperfection  ?

Nous essayons de faire vivre nos morceaux live le mieux possible sachant que jouer une musique dépouillée et lente est un exercice particulièrement dur. Le seul moyen que nous ayons trouvé pour y arriver est de s’y donner corps et âme, donc chaque live est différent, parfois top et d’autres fois moisi, mais nous trouvons actuellement le bon équilibre.

Nous voulons proposer une vision différente de nos titres, il n’y a rien de plus ennuyeux qu’un live « cd » Nous avons donc énormément travaillé la scène dans ce sens l’année passée, pour se permettre des variations bien senties et prendre du plaisir à jouer notre musique sans nous préoccuper de la technique.

Les lives sont aussi très différents d’une date à une autre du fait que nous jouons sans ordinateur sur scène, rien n’est pré-enregistré, si ce n’est certaines séquences midi. Il suffit qu’un soir nous ayons un peu picolé pour que tel filtre de tel ou tel synthétiseur soit poussé un peu plus, ou qu’un écho soit un peu trop présent pour que les titres vivent encore différemment, la seule vraie constante est la voix de Charlotte, et c’est aussi le lien entre nous quatre.

« le moteur du groupe est l’équilibre entre l’amour de l’abstrait, la beauté d’une forme de chaos organisé et la recherche de l’inconnu »

Composez-vous tous ensemble ? Y a t-il un « leader » de la composition ? Avec quoi commencez-vous : la mélodie, les textures sonores, un gimmick sur un instrument ?

Oui, nous composons de plus en plus ensemble, tout du moins depuis l’album à paraître, nous sommes passés par beaucoup de phases différentes : Night Riders était un projet solo au début qui a complètement muté en trois ans, et le fait de jouer live ensemble depuis nos débuts nous a permis de développer une culture « Night Riders » en commun. Nous n’avons pas vraiment de méthodes, si ce n’est que nous nous refusons la redite, nous évitons le confort, et nous nous obligeons à chercher une forme de pureté. Nous sommes tous multi-instrumentistes, de fait, il n’y a pas vraiment de préférence d’instruments, nous inversons les rôles selon ce que chacun a à gérer sur scène et les envies. Quand nous enregistrons c’est un peu différent, c’est la sonorité de tel ou tel instrument qui nous amène à faire des notes, et mettre plus ou moins en avant une couleur. Pour Future Noir, notre album (ndlr : à paraitre en 2014), nous avons décidé de prendre tout notre matériel, plus celui des copains sympas et nous nous sommes enfermés dans la maison d’un ami à Orléans pendant 10 jours. Nous avons certainement eu beaucoup chance de mener à bien et à terme notre projet, sachant que rien n’avait été composé préalablement, et cela nous a aussi beaucoup réconforté quand à notre démarche.

Le son de Night Riders est parfois froid, dépouillé et même industriel. Est-ce que l’inattendu, l’accident heureux qui peut arriver pendant les errances sur un instrument ou lors d’une répétition ont leur place dans votre processus de composition ?

Complètement oui, nous sommes d’ailleurs à la recherche de ce moment, une forme d’authenticité, l’antithèse de ce que devrait être un produit commercial bien pensé en 2014. Mais c’est aussi cette sensation qui rapproche un artiste de son public et transcende la simple performance pour devenir un vrai échange.

Au même titre, nous évitons l’édition des pistes quand nous enregistrons, sauf cas de force majeure ; pour nous, c’est ce qui ajoute la dimension abordable et généreuse d’un groupe, et en live et sur disque. Un album comme le premier Velvet Underground et Nico, Mingus Three ou les albums King Tubby, dépasse le simple disque… c’est une plongée dans l’inconnu mais parfaitement accompagné, il y a des « pains », des fausses notes et peu importe, car l’intention est grande. Alors certes, c’est très Arty comme discours, mais on ne peut plus honnête et intègre.

On vous bassine souvent avec le chant en français-anglais ? A notre tour. Pourquoi l’un ou l’autre ? Pensez-vous qu’il y ait un réel regain du chanté en français ? Comment l’expliquez-vous ?

Oui on nous en parle régulièrement, et chacun y va de sa petite explication. Pourquoi ? Le chant en Anglais nous paraissait plus approprié de prime abord, mais je dirais que nous sommes passés au français très naturellement. Avec le temps nous nous trouvions trop limités par l’anglais, qui est, certes, une langue plus mélodique que le français, mais très limité en terme de possibilités. Ajoutons à ça que comme beaucoup de français de notre génération, les cours d’anglais du collège ont du moyennement nous intéresser. Le résultat ne nous convenait plus du tout et nous devions d’une certaine façon passer à la vitesse supérieure, faire des choix drastiques et les assumer pour proposer quelque chose de plus personnel et moins formaté.

Oui il y a un regain certain pour le français, et c’est de plus en plus présent dans la musique pop actuelle. Pour notre part, on trouve ça plus étrange, ça nous va mieux, d’ailleurs je ne suis pas sûr que nous rechantions anglais un jour.

C’est certainement lié à l’engouement actuel pour les « jeunes gens modernes », et la vieille scène post punk Française, Taxi Girl, Marquis de Sade ou les Rita Mitsouko en tête de file. Les décès successifs d’Alain Bashung et Daniel Darc et tout le culte autour de Serge Gainsbourg et une certaine époque.

Pour ne citer qu’eux : des groupes comme La Femme, Fauve, Lescop proposent un revival très commercial et créent de nouveau une demande pour la Pop musique en français, venant des plus jeunes c’est assez révélateur je trouve. Nous ne nous reconnaissons pas non plus dans cette tendance parlé/chanté pour autant. Pour notre part c’est plutôt Michel Berger et ces folles mélodies, les films érotiques des années 70, l’âge d’or du Disco New Yorkais presque exclusivement produit par des Français et des Italiens etc, notre choix pour le chant Français part plutôt d’une association d’idée…

Enfin, et pour expliquer un peu notre démarche : Future Noir est un album tout en Français

Et nous voulions ce premier album étrange et fort à la fois, de fil en aiguille nous nous sommes retrouvés à écrire nos textes comme des cadavres exquis, à deux avec Charlotte puis à trois avec Jean-Baptiste, c’était aussi une sorte d’hommage à l’esprit dada et une façon de créer quelque choses de fou, où le sens des mots varie selon l’auditeur. Je pense que le moteur du groupe est l’équilibre entre l’amour de l’abstrait, la beauté d’une forme de chaos organisé et la recherche de l’inconnu.

Face à la difficulté de tirer parti d’une offre musicale toujours plus pléthorique, la tentation du « tout-rétro » est aisée… La musique de Night Riders ne nous semble pas forcément rattachée à une période précise. Est-ce que nous nous trompons et que vous êtes en réalité tenaillés par les anciens et le passé ? Restez-vous fidèles aux disques de votre adolescence, ou « du passé analogique faisons table rase » pourrait être une maxime guidant votre pratique de musiciens ?

On a toujours revendiqué faire de la musique de notre temps, nous nous amusons de certains codes, et autres stéréotypes par humour, recul et pop culture, et évitons les pièges un peu faciles du revival. Nous ne sommes pas du tout nostalgiques quand à la qualité de la musique actuelle, mais nous le sommes un peu plus concernant nos fréquences et traitements. Nous ne sommes pas non plus tentés de refaire à l’identique, je dirais même qu’il serait bien difficile de le faire aujourd’hui.

Donc tenaillés, pas vraiment, nous tirons le meilleur de ce qui, selon nous, a été fait, c’est donc très subjectif. Nos mélodies, harmonies, tonalités et architectures sont très inspirées de certains standards des 60’s et 70’s : David Bowie, Lee Perry, Velvet Underground, Fela Kuti, les Beatles, Pink Floyd, Herbie Hancock, Charles Mingus, et j’en passe, une époque que nous n’avons pas du tout connu mais qui nous intrigue. Nous sommes bien évidemment aussi très influencés par les 80’s et ses clichés, je dirais même que c’est ce qui nous colle le plus à la peau, car nous avons les mêmes sonorités de par l’époque de fabrication de nos synthétiseurs. C’est un peu la grosse blague entre nous, – « Charlotte, fais nous un refrain à la Jeanne Mas avec le point serré ». Charlotte accuse le coup – « Vous êtes sûr les mecs ? ».

Mais clairement et dans ce même ordre d’idées, des artistes modernes tel que Who Made Who, LCD Soundsystem, Caribou, The XX, Toro Y Moi ou encore Arcade Fire pour les plus populaires, et les labels indépendants tel que Mexican Summer, DFA,  Ghostly, City Slang, etc… ont de notre point de vue, le même genre de démarches « mix and match » sans se soucier du style ou de l’époque.

Notre but est vraiment de créer une entité anachronique et singulière en restant fidèle à notre ligne de conduite : Proposer un cross-over sans pour autant piocher dans tel ou tel discographie, c’est plutôt retranscrire par le vide notre vision « pop culture » d’enfants des 80, en trouvant LE son ou LA note ou LA ligne de chant.

Si Night Riders devait composer la musique d’un film, que raconterait-il  ?

C’est en projet depuis quelques temps mais ça ne se concrétise que maintenant. Nous avons eu une proposition pour un moyen métrage, nous devrions nous y coller courant 2014. Ce que je peux te dire c’est que ça ne sera pas spécialement heureux, et ça parlera de relations humaines et d’amour.

Si Night Riders avait composé la musique d’un film, duquel aurait-il s’agit ?

Blade Runner ou Rasta Rocket.

Quels sont vos projets, à court, moyen et long terme ?

À court terme le live, le nerf de la guerre, donc trouver un tourneur serait pas mal, sortir notre album. À long terme, avoir plus de moyens, développer notre label C’est Ça et notre studio, produire des artistes autres que nous et devenir de plus en plus indépendants.

A suivre – Part II – WELCOME TO THE MACHINE

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