Minor Sailor


Ton parcours musical ?

Jeremy : Vers 16 ans, je me suis mis à la guitare. À l’origine, c’était pour accompagner le chant — ensuite c’est devenu l’inverse. À cette époque, je vivais en Ariège au milieu de nulle part ; on était cinq dans le hameau. L’accès aux disques était limité : la guitare et le chant étaient des bons moyens de passer les soirées. Les hivers sont quand même longs là-bas…

J’ai commencé la guitare avec un prof qui était aussi un ami. Je lui ai parlé des titres que je voulais apprendre à jouer, il m’a répondu : « c’est bien mais apprend aussi à improviser ». Je n’ai jamais quitté cette approche. Ensuite, je suis rentré dans une école de guitare et d’électroacoustique à Toulouse où j’ai passé deux ans. Je suivais des cours de chant en parallèle.

J’ai joué dans quelques groupes, mais entre les répétitions qui n’aboutissaient à rien et les nuits passées sur l’ordinateur à essayer de faire de la musique, ça n’a jamais rien donné. Minor Sailor est né de cette frustration : j’avais envie que ce soit moins pénible de faire naître les morceaux. Au début, l’approche était celle de l’improvisation, après on devient plus exigeant et il faut trouver un équilibre entre l’improvisation, très directe, et l’enregistrement pour lequel on recherche un type de son en particulier.

Les groupes dont tu as fait partie jouaient dans le même registre que Minor Sailor ?

Jeremy : Non, pas du tout. J’ai commencé en arrivant dans « la ville », à Toulouse. Je faisais beaucoup de post rock expérimental : tu passes une demi-heure sur le son et tu le trafiques. Ca me plaisait bien, mais ça n’a pas donné grand chose. J’ai eu un autre groupe dans lequel on faisait de la musique électronique : l’objectif était de combiner la house de Chicago et la techno de Detroit. On a pas mal évolué pour essayer de faire une musique qui ressemblerait davantage à Air. C’était un grand écart artistique qui, je pense, a conduit à la fin du groupe.

C’est difficile de trouver la symbiose parfaite et de sortir de ton cocon. Dans un groupe, c’est un peu comme une vie de couple. Quand tu travailles constamment, tu as du mal à t’ouvrir vers l’extérieur. Ce projet là s’est terminé il y a deux ans. J’ai du mal à avoir plein de groupes en même temps. C’est très prenant.

MINORSAILOR03_LD« Les hivers sont quand même longs là-bas… »

Ton parcours en tant qu’auditeur ?

Jeremy : J’ai déménagé au fond de l’Ariège quand j’étais petit. Mon père écoutait beaucoup de musique, donc j’ai grandi avec ses disques. L’indépendance est venue en grandissant. J’étais solitaire quand j’étais petit donc j’écoutais beaucoup de musique. J’ai commencé avec Miles Davis, John Coltrane, Led Zeppelin, les Rolling Stones, Serge Gainsbourg. Je piquais des CDs dans la discothèque paternelle. Le premier CD que j’ai acheté, ça devait être Chronologie de Jean-Michel Jarre. J’étais complètement fou de “Chronologie (Part 4)”. Je devais avoir 8 ans. Le deuxième CD, c’était Imagine de John Lennon.

Là où j’étais, l’accès à la culture était délicat. Il y avait un Musibus, une sorte de médiathèque ambulante. C’était un petit camion qui allait de ville en ville. Il passait un mercredi sur deux. J’y allais dans l’après-midi. Tu pouvais discuter avec le disquaire sans qu’il essaie de te vendre la dernière nouveauté. On parlait d’un CD et s’il ne l’avait pas, il le commandait pour son prochain passage. Un exemple qui me vient : la génialissime compilationNuggets. Je piquais la carte d’emprunt de ma mère et je me prenais pas mal de CDs à écouter pour la semaine. Il n’y avait pas encore beaucoup de graveurs à l’époque. Ca m’a vraiment facilité l’accès à la culture. En fait, c’est ce disquaire qui m’a appris à jouer de la guitare. Il a été vraiment important pour moi.

Tu écoutes aussi des nouveautés ?

Jeremy : Vers 2002, j’étais très branché Björk, Radiohead, ce genre d’artistes. J’ai eu une bonne période Radiohead. D’ailleurs, un des albums qui ont le plus compté pour moi est Amnesiac. Cet album a été important, parce que ça allait de la musique free jazz à l’electro/electronica. A cette époque, il y avait aussi le label Warp, notamment Aphex Twin et Boards of Canada. J’ai découvert Sigur Ros à cette époque là, aussi. C’est amusant d’ailleurs, parce que j’ai découvert le groupe en regardant MTV chez un pote et ça m’a bluffé, parce que jusque là je croyais que MTV ne passait que de la merde !

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