KIDSAREDEAD


En écoutant The Other Side Of Town, des noms, des chansons nous sont naturellement venus à l’esprit. Plutôt que de faire une interview un peu “classic rock”, où nous aurions interrogé Kidsaredead sur ses standards, ses influences, nous avons décidé de jouer au jeu des ressemblances et des différences. Des titres en amenant d’autres, parfois en contradiction ou ayant un rapport assez indirect avec la musique de Kidasredead, nous sommes arrivés à une bonne douzaine de vidéos, auxquelles Kidsaredead n’a pas manqué de réagir !

« Here, there And Everywhere » des Beatles – 1966

Quand j’étais gamin, j’avais les compilations bleu et rouge en K7, on les avait achetées sur un marché dans le sud de la France, vraiment pas cher mais on s’est aperçu ensuite que c’était des contrefaçons, les pochettes étaient des photocopies couleur. Je les écoutais dans la voiture sur mon walkman quand on partait en vacances. Quand on arrivait près de la mer je changeais de K7 et je mettais la BO du Grand Bleu.

« Wild Honey » des Beach Boys – 1967

J’ai découvert les Beach Boys quand j’étais à la fac, et je suis devenu complètement obsédé par la sunshine pop californienne : The Association, les groupes de Curt Boettcher, Fifth Dimension avec Jimmy Webb, Strawberry Alarm Clock, The Left Banke… Mais bon les Beach Boys restent les meilleurs. J’adore tout, avant Pet Sounds, Pet Sounds, après Pet Sounds. J’ai un faible pour la période « brothers », quand Brian commence à perdre les pédales et que les frères prennent le relais. Ils se mettent à faire un truc plus soulful, blue-eyed soul, l’album Wild Honey en est un bon exemple. Ils ont des albums un peu craignos à partir de la fin des années 70 mais j’aime quand même les écouter, leurs voix sont tellement belles. Le son qu’ils produisent en chantant me laisse abasourdi à chaque fois et ils ont aussi des voix solistes très singulières, le falsetto de Brian, la voix brisée de Dennis, le ténor en porcelaine de Carl… j’adore m’amuser à les reconnaître dans la masse de chœurs. Curieusement je me souviens avoir été convaincu à une époque que le mélange de leurs voix était tellement émouvant et supérieur qu’il avait une portée révolutionnaire, j’étais persuadé que leurs harmonies vocales pouvaient réussir là où le communisme avait échoué. Mais bon maintenant grâce à internet, j’ai vu qu’ils avaient chanté pour l’anniversaire de Ronald Reagan.

« le mélange de leurs voix était tellement émouvant et supérieur qu’il avait une portée révolutionnaire, j’étais persuadé que leurs harmonies vocales pouvaient réussir là où le communisme avait échoué »

« Beyond and Before » de Yes – 1969

Mes morceaux préférés de Yes sont ceux de la BO de Buffalo 66 de Vincent Gallo, « Sweetness » et « Heart of the Sunrise ». J’ai adoré ce film, je l’ai vu au cinéma quand il est sorti avec mon ex-future /future-ex copine. Il y a aussi une scène avec « Moonchild » de King Crimson que je connaissais déjà. Je suis pas super calé en albums de Yes, les groupes de rock progressif que j’ai le plus écoutés seraient plutôt Genesis et Soft Machine. Un autre film dont la BO m’a beaucoup marqué c’est Virgin Suicide que j’ai vu avec ma femme, et grâce à laquelle j’ai découvert Todd Rundgren. La BO de Air était géniale aussi. Avec le premier Phoenix, c’était vraiment un super moment de la pop française.

Crosby Still Nash and Young ­ « Everybody I Love You » 1970

Comme le rock progressif, CSN&Y c’est aussi un groupe que j’ai écouté sur les conseils de mon père. Mes préférés restent Crosby, pour la révolution harmonique qu’il a apporté dans le folk-rock californien avec ses mélodies modales influencées par le jazz cool et Neil Young, pour moi un des meilleurs songwriters du rock. J’adore le rock californien (Eagles, Toto,…). J’ai honte mais j’adore.

« Superstition » de Stevie Wonders – 1972

Quand j’étais ado, Stevie Wonder ça me paraissait un truc un peu honteux, trop sirupeux, c’était au moment de « I’m free », son morceau qui ressemble à une pub pour une assurance. Comme « Imagine » de Lennon. On pourrait faire une compil de « Life Insurance Rock ». Mais bon d’un autre côté j’adorais aller chez Pizza Paï pour écouter la chanson « Happy Birthday » à bloc quand quelqu’un fêtait son anniversaire. Sinon, c’est un peu comme les Beatles : j’ai rien à dire tellement c’est génial.

The Shadows « Riders in the Sky » 197?

Très belle découverte, je ne connaissais pas la période disco des Shadows. J’espère qu’on pourra bientôt mettre en place des moments de dandinage synchronisé pendant nos concerts. Super la modulation !

« Dreams are my Reality » de Richard Sanderson – 1980

Je n’ai toujours pas vu « La Boum ». Il y a un passage dans « School Returnz » qui assume totalement un son de piano 80’s super cheap dans le même genre, avec une suite d’accords très californienne. Mais comme les paroles sont super tristes, je me suis dit que j’avais le droit de jouer la carte du kitsch pour contrebalancer. Les gens se demandent « Il pleure ou il bave là ? je vois pas bien »

« Radio » de Polnareff et Hans Zimmer – 1981

J’aime bien dire le mot radio en anglais, je préfère la chanson des Buggles, « Sweet Jane » du Velvet ou encore « Radio » de Hackamore Brick, un groupe méconnu très loureedien que m’a fait découvrir Flop. Sinon Polnareff, on avait le disque 80’s avec « Goodbye Marilou » et « LHOOQ » quand j’étais petit. Ma préférée est « Né Dans Un Ice Cream ».

Pavement – Grounded – 1995

J’écoutais cet album en pleurant dans le bus pour aller au lycée en 1996. Mon concert préféré de tous les temps, c’était Stephen Malkmus & The Jicks à la Gaîté Lyrique pour l’album Mirror Traffic ; grâce à J&Y et Domotic, j’étais à la meilleure place et c’était trop bien. C’est important de trouver la bonne place dans une salle de concert, ça change tout…

Charge 69 – Région Sacrifiée – 1998

Un groupe que j’ai écouté au lycée car mes potes écoutaient en boucle. Haha, j’ai l’impression que c’est eux qui chantent ! On avait fait une reprise de Ludwig Von 88 sur mon 4 pistes et je me souviens aussi d’un autre groupe avec un nom particulièrement fendard, Les Décaps. C’est pas trop ma culture le punk rock, j’ai fait le conservatoire et j’ai passé mon adolescence à décider si un groupe était bon ou non, si les morceaux étaient construits sur une suite d’accord que je n’avais jamais entendue avant ou pas. J’ai changé mon approche depuis mais j’ai gardé des séquelles.

« Qu’il y ait une part d’inhumain, un monstre métallique au milieu du paysage, les montagnes de tôles au milieu du vert des collines qui scellent l’alliance du beau et du laid, c’est un peu comme si on m’avait servi une vision du monde toute prête sur un plateau à la cantine »

Je suis très attaché à cette région ; le côté vallée – non pas sacrifiée – mais balafrée par l’industrie sidérurgique est très poétique, je trouve. Qu’il y ait une part d’inhumain, un monstre métallique au milieu du paysage, les montagnes de tôles au milieu du vert des collines qui scellent l’alliance du beau et du laid, c’est un peu comme si on m’avait servi une vision du monde toute prête sur un plateau à la cantine. J’y ai vécu des expériences fortes avec les personnes auprès desquelles j’ai grandi et c’est un endroit qui m’a aidé à construire mon identité.

J’ai rêvé cette nuit que je montais puis redescendais une colline sur un escalator en portant du matos, des pieds de projecteurs vidéo super lourds, l’escalator était plein de monde, il y avait aussi d’autres types qui portaient des trucs mais avançaient trop lentement à mon goût. J’ai fini par les doubler et à arriver de l’autre côté dans une ville qui s’appelait La Réunion (rien à voir avec l’île) et je reconnaissais parmi les visages de la foule ceux de mes camarades de classe de l’école primaire, et leurs noms et prénoms me revenaient avec la même évidence que si je récitais l’alphabet, certains que j’avais totalement oubliés depuis des années, « ah tiens Déborah Battiston, Séverine Marion, … »

« Love on Top » de Beyoncé – 2011

Je ne la connaissais pas cette chanson ; très Janet Jackson, je trouve. Beyonce, je connais surtout ses youtubes, je n’ai pas écouté les albums… J’aime bien ses morceaux qui semblent avoir influencé les Dirty Projectors ou l’inverse, on ne sait plus, comme Countdown ou Single Ladies. On m’a dit qu’il y avait un rapport avec une chanson de Kidsaredead, c’est la modulation un ton au dessus du refrain à la « Heal The World » de MJ. Comme dans « School Returnz ». Ou alors le second accord jazzy de la grille du refrain qui est aussi utilisé dans « Band From The Past ».

Noir Boy George – Messin plutôt que Français – 2012

« J’ai beaucoup d’estime pour lui, il a vraiment changé mon rapport à la musique, comme une révolution copernicienne »

Nafi était mon idole quand j’étais au lycée, on était dans la même classe en seconde, il lisait l’intégrale de William Burroughs au fond près du radiateur au lieu de suivre les cours, faisait un fanzine trop classe photocopié intitulé « Do you like Sushi », avec Seb Joly qui joue maintenant dans The Feeling of Love. A l’époque, il ressemblait à Kurt Cobain. C’est le premier bad boy que j’ai respecté. Il m’a fait découvrir Sonic Youth, My Bloody Valentine, on a même fait un peu de musique ensemble. On a continué à se voir après le lycée pendant quelques années mais là ça fait un bout de temps qu’on s’est perdu de vue. Il a fait des tonnes de groupes dont les noms sont tous plus classes les un que les autres : Plastobéton, 20000punks, A.H Kraken, The Electric Guitars (dont j’avais aidé à enregistrer le premier album d’ailleurs…j’ai prêté ma seule copie de l’album à un pote qui me l’a paumée…), The Dreams… J’ai beaucoup d’estime pour lui, il a vraiment changé mon rapport à la musique, comme une révolution copernicienne, j’ai encore peur de dire des bêtises en parlant de lui, j’ai l’impression qu’il en saura toujours plus long…

Real Estate – Talking Back wards – 2014

Le bassiste avec qui je joue en ce moment révoque souvent des morceaux qui se contentent d’utiliser la gamme pentatonique, ça me fait rire, je trouve que sa vision est réductrice. Mais là, c’est vraiment ce qui m’a bloqué quand j’ai écouté le dernier Real Estate. Ils ont un beau son mais je trouve vraiment que c’est trop gentillet. Pourtant je me retrouve assez dans leur esthétique de dépression suburbaine entre glande, nostalgie et difficulté de devenir adulte…c’est la thématique de mes chansons…

« Ma malédiction, c’est de faire des morceaux trop compliqués, trop de parties, trop d’accords… »

Dans la vague lofi, chillwave, j’ai adoré le groupe Rangers de Joe Knight. C’est plus des instrumentaux très trippés, pleins de delay crade, de solos de guitare funkadelicien et de vieux synthés qui pleurent, oubliés dans un aéroport. Moi, ma malédiction c’est de faire des morceaux trop compliqués, trop de parties, trop d’accords… c’est la principale critique que j’entends sur mes chansons. J’aurais peut-être dû persévérer au conservatoire et composer de la musique contemporaine, j’aurai été plus à ma place. Ce qui est drôle c’est que je fais des efforts pour simplifier mais que la remarque reste toujours « peut mieux faire au prochain trimestre ».

Propos recueillis par Atlas Ibiza & Nicolas Fez

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